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ThĂšme: la diffĂ©rence Au choix : PoĂšme dâun africain pour son homologue blanc (Anonyme) La diffĂ©rence de Jean-Pierre SimĂ©on RĂ©daction : Anagrammes de Pierre coran + trouver des anagrammes PĂ©riode 4 : Mars â Avril ThĂšme : Le printemps Au choix : Au printemps de ThĂ©ophile Gautier Une graine dâAlain Bosquet
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Cest par ces mots que Jean-Pierre SimĂ©on, fondateur du Printemps des PoĂštes, Ă©diteur de poĂ©sie et poĂšte lui-mĂȘme a dĂ©cidĂ© dâouvrir son recueil Politique de la BeautĂ©, paru en 2016. Nous avons voulu rencontrer
jBNOZRn. Ă la Maison de la Presse, lâĂ©crivain, dramaturge, romancier et poĂšte Jean-Pierre SimĂ©on a parlĂ© avec force de sa passion qui lâamĂšne Ă donner de nombreuses formations et confĂ©rences. © Droits rĂ©servĂ©s La poĂ©sie de Jean-Pierre SimĂ©on est un Ă©ternel printemps. rencontre La Grande Librairie a accueilli le poĂšte Jean-Pierre SimĂ©on. Romancier, dramaturge, Ă©crivain, directeur artistique du Printemps des poĂštes, il a prĂ©sentĂ© ses livres Les yeux ouverts, La poĂ©sie sauvera le monde, Lettre Ă la femme aimĂ©e au sujet de la mort. PassionnĂ©, il exprime son engouement envers cette poĂ©sie qui le touche tant. DĂšs la premiĂšre question posĂ©e par Claire Demange, prĂ©sidente d'un cercle de poĂštes Ă Clermont-Ferrand, l'Ă©crivain Ă©voque avec force la poĂ©sie et la mort. Il avoue que la poĂ©sie sauvera le monde si rien ne le sauve ». Il regrette le gĂąchis individuel et collectif. La poĂ©sie incarne un idĂ©al d'existence. J'ai une constante de l'optimisme car on peut tous gagner un peu d'humanitĂ© mĂȘme quand on est au bord de la mort Auschwitz ; on survit Ă l'inhumanitĂ© ». La poĂ©sie est un perpĂ©tuel printempsâŠ
Jean-Pierre SimĂ©on, agrĂ©gĂ© de Lettres modernes, a Ă©tĂ© formateur dâenseignants. Auteur de nombreux recueils de poĂšmes, de romans, de livres pour la jeunesse et de piĂšces de théùtre, il est actuellement directeur artistique du Printemps des poĂštes. Ci-dessous, synthĂšse de son intervention lors de la Rencontre de lâAtelier de Montluçon en dĂ©cembre a une idĂ©e trĂšs fausse et largement partagĂ©e de ce quâest la poĂ©sie. Cette idĂ©e est fondĂ©e sur lâexpĂ©rience quâon en a et qui, en gĂ©nĂ©ral, repose sur la rencontre de trĂšs peu de poĂšmes en comparaison de lâimmensitĂ© du patrimoine poĂ©tique universel, des milliards de textes. Il y a des poĂšmes depuis toujours, dans toutes les civilisations, il nây a pas une communautĂ© humaine qui nâait sa poĂ©sie - LâidĂ©e quâon sâen fait est donc forcĂ©ment trĂšs restrictive et superficielle. Elle relĂšve en plus dâa priori, de y a deux opinions courantes. La premiĂšre, câest que la poĂ©sie est cette chose charmante, chantonnante, dâune belle musicalitĂ©, quâon admire de loin, parfois un peu miĂšvre en regard du monde concret dans lequel on est immergĂ©. Et lâautre reprĂ©sentation, complĂštement Ă lâopposĂ©, câest celle dâ un objet bizarre auquel nâauraient accĂšs que quelques initiĂ©s ayant le don de comprendre ces choses qui sortent de lâordinaire, de la comprĂ©hension humaine. Il faudrait avoir une sorte de talent divinatoire pour lire comme il le faut Maurice SĂšve, MaĂŻakovski, Aragon ou Yves Bonnefoy, par reprĂ©sentations font quâon ne va pas Ă la poĂ©sie, quâelle est hors du social depuis quelques dĂ©cennies en France - ce nâest pas le cas dans toutes les maniĂšre dâhabiter le mondeJe ne vais pas mâĂ©tendre davantage sur ces dĂ©finitions historiques, socio-culturelles, mais bĂątir sur cette formule de Georges Perros, un trĂšs bon poĂšte de la fin du XXe siĂšcle Le plus beau poĂšme du monde ne sera jamais quâun pĂąle reflet de ce quâest la poĂ©sie une maniĂšre dâĂȘtre, dâhabiter, de sâhabiter ». Câest capital. Ce que manifestent Rimbaud, de Ritsos, de WhitmanâŠ, câest ce qui apparait dans la prise de parole que lâon appelle poĂšme une position claire, ferme, et complexe en mĂȘme temps devant le monde, devant le rĂ©el et au coeur du rĂ©el. Câest un type de rapport Ă lâexistence, Ă la communautĂ© humaine, au destin la poĂ©sie non comme un supplĂ©ment dâĂąme, mais comme une maniĂšre dâĂȘtre, dâhabiter le monde, comme un positionnement du point de vue humain, câest la dĂ©finir dâemblĂ©e comme une Ă©thique. Câest lĂ lâenjeu essentiel dĂ©finir une maniĂšre dâhabiter le monde, câest un projet politique. Hölderlin, le grand poĂšte allemand, lâavait dit dĂ©jĂ dans une phrase qui porte sur lâorientation que nous donnons Ă la vie Nous cheminons vers le sens si nous habitons en poĂšte sur la terre. » Or, aujourdâhui, nous faisons lâexact contraire et câest pour cela que nous allons dans le mur, que nous allons vers une sorte de grand suicide lâavoir et le paraĂźtre Alors que signifie vivre en poĂšte ? Câest lâexact contraire des normes de comportement quâon nous impose actuellement. LĂ oĂč la poĂ©sie est subversive, câest quâelle propose dans la relation Ă soi, dans la relation au monde, au rĂ©el le contraire de ce qui se passe aujourdâhui la marchandisation du monde occidental qui se dĂ©veloppe partout avec la mondialisation, le dĂ©ni de lâhumain, en raison du primat sur lâhumain de superstructures Ă©conomiques, de lâidĂ©ologie tout Ă fait organisĂ©e et pensĂ©e. Ce qui fait que petit Ă petit, sans que nous nous en rendions compte, nous sommes vidĂ©s de notre poĂ©tique, câest lâexact contraire puisque depuis toujours les poĂštes ne cherchent quâĂ fonder dans leur parole un surcroĂźt dâhumanitĂ©. Nous connaissons la fameuse phrase de JaurĂšs On ne naĂźt pas humain, on le devient ». Vivre en poĂšte sur la terre, câest simplement se donner pour tĂąche premiĂšre, presquâexclusive â câest lĂ lâengagement absolu du poĂšte - de devenir plus humain et de comprendre les conditions de cet enjeu comment on devient plus qui domine aujourdâhui, câest lâobsession de lâavoir, la prĂ©dominance de la finance, la volontĂ© de pouvoir qui engendre la compĂ©tition et la compĂ©titivitĂ©, les hĂ©ros, ĂȘtre plus que les autres, câest-Ă -dire la nĂ©gation de lâautre. Toutes les images, les figures, les idoles quâon prĂ©sente Ă nos yeux et nos oreilles comme enviables, Ă travers les discours sur la sociĂ©tĂ©, nous enjoignent dâĂȘtre des ĂȘtres de pouvoir, dâĂȘtre toujours un peu plus que lâautre, un peu plus fort, un peu plus savant, plus expert que lâ profondeur irrĂ©ductible de chaque ĂȘtreCâest ce que rĂ©cuse fondamentalement tout poĂšme, puisque toute poĂ©sie dit dâemblĂ©e la relativitĂ© de tout savoir, tout poĂšme est lâaveu dâun savoir limitĂ©, rien nâest dĂ©finitivement clos dans un savoir. Dans nos sociĂ©tĂ©s, il y a lâavoir, le pouvoir et le paraĂźtre. La valeur de lâĂȘtre est dĂ©finie par le paraĂźtre, par ce que lâon sait de lâimage. Et lâon juge tout un chacun, toute chose, tout Ă©vĂ©nement sur lâimage, sur lâapparence premiĂšre. Or, depuis le premier temps du premier poĂšme, lâeffort du poĂšte, câest de dĂ©passer la vue premiĂšre. Donc, dans une sociĂ©tĂ© gouvernĂ©e par la vue de surface, par lâapparence, oĂč nous lisons le monde au faciĂšs, oĂč nous lisons lâautre au faciĂšs, câest-Ă -dire dans une saisie partielle, rĂ©ductrice, scandaleusement mensongĂšre du rĂ©el, dans ce monde la poĂ©sie incarne le contraire. Car tout poĂšme cherche ce que le rĂ©el ne sert pas dâabord, nâoffre pas de lui-mĂȘme. Tout poĂšme cherche Ă creuser, Ă faire apparaĂźtre la profondeur irrĂ©ductible, insolvable, illimitĂ©e de chaque ĂȘtre, de chaque chose, de chaque geste, chaque Ă©vĂšnement, chaque pensĂ©e, de chaque sentiment, de chaque phĂ©nomĂšne, comme disent les philosophes. La poĂ©sie donne expansion Ă la chose minime, banale, triviale, la poĂ©sie revendique le droit dây voir, dây rencontrer, dây explorer une infinie rĂ©alitĂ©, au-delĂ de lâapparence immĂ©diate, au-delĂ de la dĂ©finition, de la la peur de lâautre. Ătreindre le mondeLe grand mal de notre temps, câest lâobsession de la sĂ©curitĂ©, de lâassurance, on est dans une grande peur, la peur dâĂȘtre dĂ©bordĂ© dans ses frontiĂšres. Et tout est fait pour nous infliger cette peur, pour nous la transfuser. Nous avons une peur ontologique, native, premiĂšre, celle de la solitude, de la perte, de lâabandon, de la catastrophe. Le bĂ©bĂ© en fait lâexpĂ©rience, au premier jour quand il est laissĂ© seul, hors des bras du pĂšre ou de la mĂšre, dans un lit, dans une piĂšce. Nous naissons avec lâappĂ©tit, comme lâenfant, de tout voir, les yeux grands ouverts, la volontĂ© terriblement passionnĂ©e dâĂ©treindre le monde, et en mĂȘme temps avec cette peur premiĂšre de la perte, de la solitude. Et il est trĂšs commode de lâexploiter, de fonder sur elle des rapports collectifs celui qui a peur est facilement asservi, par la peur elle-mĂȘme, mais asservi aussi aux discours qui prĂ©tendaient le protĂ©ger du monde. Ce sont tous les discours sĂ©curitaires. Et nous avons tous en nous une demande sĂ©curitaire, la volontĂ© dâĂȘtre protĂ©gĂ©s du compliquĂ©, du trouble, de lâinconnu. Nous avons trĂšs profondĂ©ment cette peur en nous, en mĂȘme temps que nous avons le dĂ©sir du dĂ©passement, le dĂ©sir de lâautre, de la nuit, de ce qui grands processus dâasservissement se jouent Ă partir de cette rĂ©flexion sur la peur individuelle et comment lâ exploiter. Dans les sociĂ©tĂ©s modernes, aujourdâhui, mais aussi dans les dĂ©cennies ou les siĂšcles prĂ©cĂ©dents. Cette peur premiĂšre est organisĂ©e dans toute sociĂ©tĂ© parce quâelle permet un pouvoir, la main mise sur les consciences, et elle a pour consĂ©quence quâon se protĂšge symboliquement par ce que jâai appelĂ© les dĂ©finitions, les catĂ©gorisations, tout ce qui immobilise, et par le souci de lâidentitĂ© stable, de lâidentification. On est aujourdâhui dans une nĂ©vrose extrĂȘme de lâidentitaire. Tout doit ĂȘtre associĂ© Ă une dĂ©finition, or "dĂ©finition" veut dire exactement "limitation" le mot vient du latin fines qui veut dire frontiĂšre. Si on vous dĂ©finit, on vous ferme, on vous finit, on met un contour autour de vous. Or, aujourdâhui, tout est fait pour que nous nous contentions de nos contours, nous et tout objet, toute chose. On peut trĂšs facilement dĂ©finir une chose sur la premiĂšre vue, sur la premiĂšre conscience nâexplore que dans le temps et lâattentionDe plus, nous vivons Ă une Ă©poque oĂč le temps a disparu, nous sommes gouvernĂ©s par lâaccĂ©lĂ©ration majeure du temps â avec lâInternet, le TGV, par exemple. Or, pour aller au-delĂ de la surface et de la dĂ©finition rapide de chaque chose et de chaque ĂȘtre, de la dĂ©finition immĂ©diate, consensuelle, conventionnelle, conforme - le thĂ©orĂšme des trois "con" -, il faut obligatoirement du temps. Mais le monde de la marchandisation, le monde capitaliste, fondĂ© sur le principe dâĂ©conomie, a depuis le XIXe siĂšcle thĂ©orisĂ© cette abolition du temps, ce vol du temps. Le temps est la condition indispensable Ă "la traversĂ©e au-delĂ de lâapparence", câest-Ă -dire lâouverture scrutative de la conscience. Car il nây a de conscience qui explore, qui interroge, qui ne se contente pas de la premiĂšre rĂ©ponse donnĂ©e par le faciĂšs et qui dĂ©veloppe sa question que dans le temps, que dans ce quâon appelle trĂšs profondĂ©ment lâattention. Or cette qualitĂ© humaine premiĂšre, qui fonde lâhumain et dont tout le monde a le partage, est aujourdâhui la plus ravagĂ©e lâ attention radicale qui engage tout lâĂȘtre, qui est sans concession, câest celle de Van Gogh devant le paysage, de Giacometti devant sa matiĂšre, de toute personne qui prend le temps de lâarrĂȘt et de lâimmobilisation de soi, qui rompt la course Ă©ternelle du geste quotidien, de ce continuum, pour y créér une brĂšche. Et cette brĂšche, câest un appel Ă aller Ă la profondeur, qui suppose un effort, pour que se mobilise Ă lâextrĂȘme la combat majeur le langageTout ce que lâon peut dĂ©crire des instruments dâoppression individuelle et collective se joue essentiellement dans le langage. Il y a lĂ un combat politique majeur. Or les premiers a avoir eu la conscience de lâoppression possible dans le langage, ce sont les poĂštes. La premiĂšre raison de la poĂ©sie, câest de se rebeller devant lâextrĂȘme danger du langage Ă enfermer, Ă asservir, Ă subordonner, Ă se faire lâinstrument de la rĂ©duction du monde, du connu, du vĂ©cu Ă sa surface Ă©mergĂ©e, ce qui donne un totalitarisme la poĂ©sie permet de comprendre cela. Georges Bataille disait Nous nâaurions plus rien dâhumain, si le langage en nous devenait tout Ă fait servile ». Odysseus Elytis, magnifique poĂšte grec, prix Nobel de littĂ©rature, postĂ©rieur Ă Yannis Ritsos, le formule autrement LĂ oĂč la montagne dĂ©passe du mot qui la dĂ©signe se trouve un poĂšte. » LĂ oĂč le monde dĂ©passe les mots qui le dĂ©signent se trouve la poĂ©sie. La poĂ©sie sert Ă nommer, Ă rĂ©vĂ©ler, Ă faire agir, Ă rendre prĂ©sent Ă la conscience, Ă faire apparaitre le monde dans tout ce que le langage ordinaire, normĂ© langage, Ă sa naissance, porte, comme tout ce qui est humain, deux choses en mĂȘme temps, son affirmation et son contraire. Imaginons lâhomme qui fonde le langage, cet acte gĂ©nial fondateur delâHumanitĂ©. Pour simplifier, il y a au dĂ©part articulation de quelques sons arbitraires, qui vont ĂȘtre isolĂ©s et attachĂ©s Ă lâobjet, Ă une chose un murmure, un borborygme qui va ĂȘtre reconnu, identifiĂ© Ă la pierre, au rocher, au bĂąton. Pourquoi cela fonde lâhumain ? Parce quâest inventĂ© plus que le mot la symbolisation. Ce que je dis nâest pas lâobjet, mais le reprĂ©sente. Câest de cela que se dĂ©duit ce qui nous fait tous, la mĂ©moire. Ce nâest que parce que je peux nommer lâabsent que la mĂ©moire apparait. Et ce nâest que parce que je peux dire lâabsent, que je peux dire le passĂ©, le futur. Avant cela, on est "le nez dans la terre", dans une relation animale, rude, sans distance, sans recul, donc sans espoir dâanalyse et de comprĂ©hension au-delĂ de la vue et de la sensation premiĂšres. En inventant la symbolisation, lâhomme invente la mĂ©moire, lâhumain, lâhistoire, le passĂ© et lâavenir. Et en inventant lâavenir, il invente le projet, une pensĂ©e qui se dĂ©place vers lâavant. Mais avec ce langage, il invente aussi la possibilitĂ© de la prĂ©servation de lâespĂšce, parce que cela lui permet lâĂ©change individuel et collectif, de sâentendre, de parler ensemble, et donc une entente commune sur le langage premier nĂ©cessaire... et rĂ©ducteurMais pour que ce langage soit efficace, il est une condition absolue, nĂ©cessaire... et catastrophique. Câest quâil soit univoque, quâil nây ait pas de malentendu. Le principe de ce langage premier, fondateur du collectif, est dâĂȘtre rĂ©ducteur je parle, je suis compris. Cela permet aujourdâhui encore Ă chacun dâentre nous dâagir, de prendre le train, de dire "ferme la fenĂȘtre, la porte", etc., câest-Ă -dire lâexacte nĂ©cessitĂ© quotidienne quâon appelle le pragmatisme, lâorganisation de notre champ de vie le principe de cette langue commune, rĂ©duite Ă des sens limitĂ©s, est aussi dĂ©lĂ©tĂšre, mortifĂšre. Parce que le mot qui est un concept, une reprĂ©sentation abstraite dâune chose concrĂšte, du vĂ©cu tangible, ce mot perd la profondeur de lâexpĂ©rience, lâĂ©paisseur de la vie, la saveur, le parfum, le touchĂ©, la mĂ©moire, lâaffect, tout ce quâil a traversĂ©, tout ce quâil porte en lui dâhistoire humaine. Si je dis le mot "arbre", nous nous comprenons, mais le mot arbre perd tout ce que nous avons vĂ©cu, chacun, des arbres ; car chacun dâentre nous est riche de milliers dâarbres, ceux que nous avons vus, des cabanes construites, de la branche sur laquelle nous nous sommes appuyĂ©s, lâarbre taillĂ©, le tronc sur lequel on pose son Ă©paule. Cette infinie expĂ©rience de lâarbre est lâĂ©paisseur du rĂ©el, sa profondeur, elle dĂ©borde du mot Ă chaque instant, lâhomme fait de toute chose une infinie rĂ©alitĂ©, une rĂ©alitĂ© indĂ©finie, illimitĂ©e. Autant on a besoin des mots, autant les mots perdent lâinfinie profondeur de la rĂ©alitĂ© ce que nous vivons, ce que nous pensons, ce que nous ont lĂ©guĂ© nos parents, nos grands-parents, ce que lâenfant nous a rĂ©vĂ©lĂ©, ce sont les sens agis par lâhomme, ceux de notre vie, de notre libertĂ© de faire de chaque chose le contraire de ce quâelle est ou lâindĂ©fini, lâimprĂ©vu de ce quâelle est. Et ça, câest la poĂ©sie. Câest la poĂ©sie qui dit la part de lâarbre manquante, la rĂ©alitĂ© manquante, la part manquante de la langue. Câest pour cela que depuis toujours, depuis lâaube des temps, sâest levĂ© un poĂšte. Le langage a Ă©tĂ© constituĂ©, organisĂ© et il a organisĂ© le rĂ©el comme on le vit aujourdâhui encore dans la nĂ©cessitĂ© immĂ©diate, univoque â qui est aussi nĂ©cessaire. Mais cela "vole le rĂ©el". Ce sentiment profond dâĂȘtre frustrĂ© de la vĂ©ritĂ© du rĂ©el, nous lâĂ©prouvons tous les jours, nous le verbalisons, dĂšs lâenfance. Ainsi, sollicitĂ©s pour formuler notre Ă©tat dâĂąme, notre pensĂ©e, nous sommes souvent dans lâimpossibilitĂ© de le faire, "nous nâavons pas les mots pour le dire". Parce que le langage ordinaire nâa comme destination et possibilitĂ© que de dire "le sens minimum intergĂ©nĂ©rationnel garanti".Bien sĂ»r le langage premier univoque doit ĂȘtre transmis parce quâil permet lâintĂ©gration sociale, mais il faudrait que dĂšs le berceau, dĂšs lâenfance, lâantidote soit aussi donnĂ©, le langage impossible qui, au lieu dâĂȘtre monosĂ©mique - un mot un sens-, est un langage inverse, qui tient parole, qui parle, qui ne se contente pas de lâĂ©noncĂ©, qui porte en lui la chair et le sang de lâhumain câest la diffĂ©rence entre lâĂ©noncĂ© et la poĂ©sie, dĂ©flagration du langage, nous sauve de la normeUn langage investi de toute une expĂ©rience de vie, et pas seulement de la sienne, subjectivement, de celle de toutes les rencontres, et y compris dâexpĂ©riences contradictoires Ă la sienne, câest un langage neuf. Câest celui que le poĂšte invente par des actes iconoclastes, asociaux, libertaires il va consciemment, volontairement toucher aux normes du langage, dans toutes ses composantes Dâabord le poĂšte rompt le rythme qui fonde le langage premier, il rompt le code du signal, cette carte des correspondances mot-sens, qui est un asservissement, une subordination du mot au sens prĂ©vu, organisĂ©, lĂ©gitimĂ©. Mais qui lĂ©gitime le sens dâun mot ? Si lâon peut Ă la rigueur pour un objet, une chose Ă©tablir une correspondance, qui, pour une rĂ©alitĂ© de lâordre de lâhumain, par exemple ce qui relĂšve du sentiment, de la pensĂ©e, qui dĂ©cide du sens ? Il faut penser la constitution idĂ©ologique du lexique. Le poĂšte touche au lexique, Ă la syntaxe, Ă la composante sonore câest une dĂ©flagration du langage. Le poĂšte choisit une anormalitĂ© consciente. Pourquoi ? Parce que cela nous sauve de la norme, parce que toute normalisation est oppressive, rĂ©duit le rĂ©el Ă la catĂ©gorie, Ă la dĂ©duction, Ă lâinjonction, Ă la dĂ©finition, Ă lâ poĂšte, en crĂ©ant une langue qui nâest plus monosĂ©mique mais devient polysĂ©mique, invente un objet bizarre, un langage qui nâa pas de comprĂ©hension immĂ©diate. Ce qui nous embĂȘte bien aujourdâhui, gouvernĂ©s que nous sommes par Wall Street et autres, parce que cela veut dire du temps, une latence entre la chose prononcĂ©e et la chose comprise. Le langage ordinaire, celui du discours politique, du Journal de 20h, est compris trĂšs vite, immĂ©diatement, et on doit comprendre trĂšs vite sinon on est "dĂ©valorisĂ©" dans ses capacitĂ©s intellectuelles. Le poĂšme, lui, rĂ©clame de ne pas ĂȘtre compris, de ne jamais ĂȘtre complĂštement compris. Le propre de la poĂ©sie, câest de dire aussi ce qui nâest pas limitĂ© dans la comprĂ©hension, dans la saisie quâon en a. Câest justement lĂ que la parole est lâexacte vĂ©ritĂ©, parce que rien de ce qui fonde notre existence nâest dĂ©finissable, rien nâest dĂ©finitivement compris. Parce que si câĂ©tait le cas, nous nâaurions plus dâavenir. Et câest bien ce que lâon veut nous faire croire aujourdâhui, câest ce que le langage dominant veut nous faire croire, nous enjoint de croire. Le langage dominant est un implant permanent, qui diffuse Ă tout instant, tous les jours, par tous les moyens, comme jamais dans lâhistoire de lâHumanitĂ©, ce quâil faut comprendre du rĂ©el, ce qui est nĂ©cessaire dâen comprendre, codifiĂ©, lĂ©gitimĂ© nous nâavons Ă comprendre que parole libre libĂšre les reprĂ©sentations du mondeDepuis toujours, dans toutes les communautĂ©s humaines, il y a des gens qui ont inventĂ© un langage impossible, atypique, qui Ă©chappe Ă toutes les injonctions pour dire le rĂ©el, parce quâil a cette volontĂ© dâĂ©quivoque du sens, il conditionne une parole libre devant le rĂ©el. En poĂ©sie, on peut tout dire, je peux dire la neige est rouge et chaude, alors quâon apprend tous quâelle blanche et froide. Mais la rĂ©alitĂ© de la neige, câest quâelle est de toutes les couleurs du monde, câest la rĂ©alitĂ© de la poĂšte est le garant tout au long de lâhistoire humaine dâune libertĂ© insolvable, irrĂ©ductible dans la langue... peu importe le lĂ©gislateur de la langue, les grammairiens qui existent depuis longtemps. Je me permets de faire ce que je veux avec les mots, avec les rythmes. Et cette libĂ©ration de la langue a des consĂ©quences cruciales. Car sans les poĂštes, la pente fatale de la normalisation, la rĂšgle des trois cons - conventionnel, consensuel, conforme - aurait dominĂ© sans conteste. Je rappelle la phrase de Georges Bataille Ă©noncĂ©e au dĂ©but Nous nâaurions plus rien dâhumain si le langage en nous devenait tout Ă fait servile ». Or, aujourdâhui, le langage est servile et, asservis Ă un langage servile, nous perdons ipso facto notre humanité⊠car ce qui fonde lâhumain, câest la capacitĂ© Ă subvertir le langage, Ă le libĂ©rer, parce que libĂ©rant le langage, il libĂšre les reprĂ©sentations du a toujours existĂ© Ă cĂŽtĂ© du langage normatif, imposĂ©, plusieurs langages, de mĂ©tiers, dâargot des rues, des langages de rĂ©bellion intuitive, implicite, populaire le principe de la poĂ©sie est dans le peuple. Câest ce quâaffirme le livre magnifique dâEluard, PoĂ©sie involontaire et poĂ©sie intentionnelle, Ă©crit pendant la guerre, ce qui fait sens. Dans toutes les grandes dictatures, dĂšs lâAntiquitĂ© jusquâĂ aujourdâhui, quand il y a un rĂ©gime oppressif, ce sont les poĂštes quâon met dâabord en prison ou quâon assassine Pinochet au Chili avec Neruda et Victor Jara, Franco avec Lorca, ces hommes qui dĂ©gagent pour nous une autre comprĂ©hension du monde. Et sâil y a une autre reprĂ©sentation du monde, alors dâautres mondes sont que la poĂ©sie sauvera le monde » veut dire vivre dans une alerte permanente, dans une attention qui ne cesse jamais, ĂȘtre comme ces grands crĂ©ateurs qui ont la volontĂ© absolue de saisie de la vie, de toutes ses composantes, câest-Ă -dire sans repos, sans relĂąchement, sans jamais trahir la vĂ©ritĂ© contradictoire, dâune complexitĂ© illimitĂ©e de la vie. Ătre artiste jusquâau bout des ongles. Ceci vaut pour le danseur, lâhomme ou la femme de théùtre, le plasticien, etc., une sorte dâengagement trĂšs profond qui ne tiendra jamais le rĂ©el pour nous avons besoin non pas dâune petite clause de conscience, nous avons besoin de lâart, le moins rĂ©cupĂ©rable, le plus radical et qui touche Ă lâinstrument dâasservissement le plus violent et le plus partagĂ© de la langue, au coeur de notre pensĂ©e. Si on ne pense pas le monde avec les caractĂ©ristiques culturelles intransigeantes Ă©voquĂ©es, celles qui incarnent la poĂ©sie du jour, la rebellion devant lâunivocitĂ© du sens, la volontĂ© illimitĂ©e de rĂ©cuser lâidentitĂ© en tout, lâidentitĂ© fermĂ©e, si nous ne prenons pas cela comme point dâappui pour penser une sociĂ©tĂ© viable, toutes les autres fatalitĂ©s Ă©conomiques, idĂ©ologiques, sociales, religieuses, vont nous ramener Ă des seul point dâappui universel, câest la poĂ©sie â câest pour cela que cela nous intĂ©resse parce quâelle nous rend co-humain â point dâappui irrĂ©ductible de la libertĂ© humaine. Et câest en mĂȘme temps une exigence. Le grand schĂ©ma dominant, câest lâimmobilisation de tout, des comportements dans des modĂšles, dans des prĂȘts Ă porter, des prĂȘts Ă penser rĂ©ducteurs. Nous sommes dans un monde identitaire qui veut fixer la vie, qui la tue. Or il nây a de vie que dans le mouvement et il nây a de pensĂ©e et de pensĂ©e de la vie que dans le et synthĂšse MichĂšle KiintzLa vidĂ©o et lâenregistrement sont disponibles ici. Url de Cerises n°312 , 27 janvier 2017
" Seules des mains vraies écrivent de vrais poÚmes. Je ne vois pas de différence de principe entre une poignée de main et un poÚme ". Paul Celan,... Lire la suite 13,00 ⏠Neuf Expédié sous 3 à 6 jours Livré chez vous entre le 1 septembre et le 6 septembre " Seules des mains vraies écrivent de vrais poÚmes. Je ne vois pas de différence de principe entre une poignée de main et un poÚme ". Paul Celan, lettre à Hans Bender. Cette formule de Paul Celan, que Jean-Pierre Siméon aime citer, caractérise aussi bien sa posture d'écrivain que son rapport au monde. PoÚte de la fraternité et de la main tendue, il l'est assurément. Ses recueils, autant que ses romans ou ses textes dramatiques, révÚlent un auteur qui fait de la littérature le lieu de toutes les rencontres, de tous les partages, de toutes les expériences de vie. Une fraternité qui est également au coeur de sa démarche d'homme, celle d'un optimiste tragique qui fait du rapport humain un rempart contre l'angoisse de vivre - et de mourir. Date de parution 01/10/2008 Editeur ISBN 978-2-84562-138-1 EAN 9782845621381 Présentation Broché Nb. de pages 144 pages Poids Kg Dimensions 14,0 cm à 20,0 cm à 1,0 cm
Un rĂ©citde ChloĂ© LandriotPrĂ©face de Jean-Pierre SimĂ©onCoĂ©dition DĂ©charge et Gros Textes, 48 p., 6 âŹParadoxe ChloĂ© Landriot est une jeune femme de 36 ans qui cĂ©lĂšbre les temps anciens. Son petit livre sâimpose par sa diffĂ©rence dans le champ des parutions actuelles intitulĂ© sobrement Un rĂ©cit, câest une genĂšse du monde, qui renoue avec la fantaisie et le mystĂšre dâun poĂšme est portĂ© par le souffle, le chant rythmĂ© par la longueur des vers et les jeux sur les commence bien dans les noces de lâeau et de la lumiĂšre jaillissent la terre, les plantes et les bĂȘtes, et puis les hommes et le verbe. Le poĂšte cĂ©lĂšbre alors lâharmonie heureuse et les mĂ©tamorphoses du vivant. Nous avons Ă©tĂ© des arbres/Sans effort nos racines/Ont lentement plongĂ© dans le sol/Faites pour Ă©pouser la terre. »Mais vient le rĂšgne de la rationalitĂ© et de ses excĂšs le langage devient instrument de classification. Le monde nâest plus quâun catalogue » Ă la merci de lâhomme, qui le dĂ©coupe jusquâĂ le tuer. Le texte est alors interrompu par le dessin dâune vague dĂ©chaĂźnĂ©e, de lâartiste An SĂ©. Puis ce monde mort, et bien mort, renaĂźt de nouveau Ă la lumiĂšre. ChloĂ© Landriot explique Jâai peur. Jâai peur pour la planĂšte, pour la Terre, pour mes deux jeunes enfants. Mais câest parce que je crois Ă la destruction probable du monde que je mâefforce dâĂȘtre heureuse. Et la poĂ©sie rĂ©vĂšle lâintensitĂ© de mon sentiment dâĂȘtre en vie. » La revue DĂ©charge, qui, depuis sa crĂ©ation en 1981, a publiĂ© plus de 1 500 poĂštes dâaujourdâhui, invite les nouveaux talents Ă publier des recueils chez un Ă©diteur partenaire, Gros livrets fabriquĂ©s artisanalement sont vendus Ă un prix modique.
23 avril 2012 1 23 /04 /avril /2012 1905 Jean Pierre SimĂ©on est nĂ© Ă Paris le 6 Mars 1950. Il est lâauteur de cinq romans, de livres pour la jeunesse, de huit piĂšces de théùtre et de recueils de poĂ©sie. Il est l'auteur du livre La nuit respire qui est un recueil poĂ©tique. L'image qui illustre la premiĂšre de couverture est sombre, inquiĂ©tante, la couleur bleue est dominante mais il y a aussi u n peu peu de beige. L'image nous aide Ă comprendre le titre La Nuit respire car le bleu reprĂ©sente la nuit et le beige les nuages, lâair, la respiration. Martine Mellinette est l'illustratrice, elle a utilisĂ© la technique du collage. Dans des poĂšmes de ce livre nous avons ressenti des Ă©motions et perçu des sensations La couleur Les couleurs de l'invisible » La nuit La nuit respire » Le silence Apprenti du silence » Voici quelques exemples de poĂšmes de ce recueil Les Couleurs de lâinvisible Je vous dirai la couleurdes choses invisiblesla couleur qu'on entendla couleur qu'on respireLa guirlande bleue du violonet la pourpre des guitaresle vert profond du ventdans le soiret l'or fragiled'une caresseJe vous dirai la voix perduedans l'indigo des solitudeset le calme orangĂ©prĂšs des yeux doux qu'on aimeJe vous dirai l'arc-en-cielqui naĂźt en vousde la patience et de l'oublide la dĂ©faite du silenceet du geste rĂ©conciliĂ©car comme vous j'aime et je visdans l'arc-en-ciel de mes songes. La nuit respire La nuit respire Qui va qui vient Qui rĂŽde et nous regarde Dans les failles de la nuit ? Le vent traque un loup d'ombre Sur les murs Des oiseaux frĂŽleurs Ferment leurs ailes froides Sur la lune La ville s'Ă©gare Dans ses futaies de pierre La nuit respire Et nous dormons tranquilles Les yeux dans l'aube PubliĂ© par Lucie, Doriane, Mathis et Dylan, 5D - dans S
poésie la différence de jean pierre siméon